Claude Faure, élève à Jean Macé Grenoble en 1962

Claude Faure 

 

Le 19/06/2000

Mon enfance à l’école Jean Macé

On dit souvent que nos souvenirs commencent à l’âge de 4 ou 5 ans. Pour moi, ils correspondent à quelques ” flashs ” de mon entrée en 1962 à l’école maternelle Jean Macé jouxtant la grande école.En septembre, la rentrée des classes concernait un nombre d’enfants plus important qu’aujourd’hui. Les maîtres et maîtresses (appellation d’origine) étaient aussi plus nombreux. A l’école maternelle, deux institutrices Mmes Monay et Violat ainsi que Mme Gaillard (aide maternelle) qui habitait notre quartier.
En dehors des frères et sœurs scolarisés en même temps, la plupart des enfants étaient de notre cité ou de la cité SNCF des Martyrs reliée ou séparée de la nôtre par un pont. Entre ces deux mondes une rivalité digne de la guerre des boutons occupait nos jeudis, jour de repos, et nos fin de journées.

D’autres élèves sont venus, issus de famille harki, terme un peu confus, dont les parents ayant fuit l’Algérie, furent logés ” provisoirement ” près de la voie de chemin de fer, connurent une intégration et une scolarisation difficiles.

Dans ce contexte, quelques souvenirs marquants surnagent.
La rentrée avec le port de la blouse ou du tablier obligatoire, l’apprentissage de la lecture au moyen de mots à assembler, construction de phrases telles que : ” Rémy a coupé la tulipe “, ponctuée également par des spectacles d’illusionniste (magicien transformant un bol de lait en confettis, sidérant !!), et de séances cinéma payantes puisque nos parents nous donnaient une pièce de 20 centimes (avec un coq sur une face) pour participer à ces séances.
Pour le reste, je n’ai pas oublié le bol de lait le matin à l’école et la sieste l’après-midi. Mais par dessus tout, le souvenir d’un cagibi ou chambre noire. Les enfants turbulents y étaient enfermés. Heureusement, ce fut plus souvent une menace qu’une réalité !!

Puis vint la grande école ou école primaire réservée aux garçons puisque la mixité n’était pas à l’ordre du jour. Là, comme disaient nos parents, les choses devenaient sérieuses, il ne fallait plus s’amuser. Sentiment bizarre, le fait d’être passé de l’autre côté du mur et tout changeait ; la discipline, l’aménagement de la classe.
Cette classe composée de bureaux en bois doubles, déjà gravés de prénoms, percés de deux trous à chaque extrémité dans lesquels se trouvait un encrier en verre qu’un élève désigné, remplissait d’encre à l’aide d’une bouteille munie d’un bec métallique. Bureau que l’on cirait en fin d’année à l’aide d’un chiffon et de cire d’abeille dont l’odeur m’est restée.
Une estrade, un tableau noir, des craies, un brosse pour effacer qu’un élève tapait sur le bord de la fenêtre de classe, laissant un nuage de craies s’envoler. A gauche du tableau, de grandes cartes de France, à droite un mètre, un rapporteur, un compas, tous géants, pendaient au bout d’un clou.

En primaire les choses devenaient plus importantes. En effet, écrire à l’aide d’un porte plume, muni d’une plume Gauloise ou Sergent Major n’avait pas le même rendu surtout sur des cahiers de brouillon d’un papier médiocre, aidé par un buvard rose et un chiffon.

Le maître d’école nous enseignait les rudiments du français et des mathématiques pas encore modernes, de la grammaire sous le regard bienveillant de Monsieur BLED et son traité à couverture bleue, hérité de mon frère aîné et ceci jusqu’à 18 heures fin de l’étude quasi obligatoire.

Les récréations, suivant les saisons, nous permettaient de disputer ( ou de se disputer) des matches de foot avec une balle de tennis, des batailles de marrons tombés de l’arbre, en attendant la neige.
D’autres obligations existaient aussi, telles que la participation à la cérémonie du 11 novembre avec discours et remise d’une gerbe de fleurs, devant la plaque accrochée au mur de l’établissement et quel que fut le jour de la semaine. (Samedi et dimanche compris)
Si la maternelle nous nourrissait, l’école primaire nous lavait. En effet, notre cité HLM ne disposait pas de douches, et c’est donc 2 fois par semaine que munis de notre savonnette et d’un berlingot de shampooing DOP, sous la surveillance de Mme Guiffray (femme de ménage) que nous allions prendre notre douche. Salle de bains hors pairs, composée de 4 ou 5 carrés douche.
Un des temps forts de notre école était aussi la participation à la fête de la jeunesse, l’occasion d’apprendre tout au long de l’année, une chorégraphie ou plutôt ” les mouvements d’ensemble “. En fin d’année, au stade municipal regroupés avec d’autres écoles, tous vêtus d’un short bleu et d’un maillot blanc, nous effectuions cette représentation sous le regard de nos parents. Moments forts en souvenirs, surtout ne pas se tromper !
La fin juin arrivant, il restait le voyage de fin d’année. Les classes de mer ou de neige n’existaient pas.
Alors ce voyage représentait une véritable expédition puisque c’est en car qu’il nous permettait de découvrir le parc de la Tête d’Or à Lyon (un pays presque étranger !) ou le village de Pérouge, le bout du monde.
Souvenirs très forts, où le maître et la maîtresse nous apparaissaient totalement différents.
Ces voyages représentaient pour nous un évènement exceptionnel et primordial car très peu de parents possédaient une voiture.

Des souvenirs, il y en aurait encore des tas, mais …
alors , le dernier, ce dernier souvenir qui fut si fort.
Le départ à la retraite de notre maître d’école qui nous avait suivis tout au long de ces années de primaire.
Nous lui avions offert une montre, cadeau somptueux à l’époque, et juste avant la sonnerie, tous les élèves de classes ont chanté ” Adieu Monsieur le Professeur, on ne vous oubliera jamais … ” L’émotion et les larmes étaient là.

A l’heure où mes enfants, scolarisés à Jean Macé, ont refait le même parcours que le mien, il me reste le souvenir d’un maître d’école, Monsieur Arnaud, craint mais respecté, toujours à notre écoute, nous ayant au cours de ces années heureuses, inculqué je crois des valeurs et des connaissances ainsi qu’une partie de notre éducation pour la vie.

D’après les mémoires de Claude FAURE – papa de Céline